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Pranayama : le souffle du yoga

Si vous suivez des cours de yoga, vous avez déjà certainement entendu le mot pranayama, et vous savez probablement qu’il est lié à la respiration. Mais connaissez-vous le sens de ce terme sanskrit, ce qu’il recouvre, et quelle est sa place dans la pratique du yoga ? Au-delà des exercices de respiration les plus courants tels que la cohérence cardiaque ou la « respiration en carré », le pranayama, partie intégrante de la philosophie du yoga, est une étape clé sur le chemin de la plénitude choisi par les yogis. Aujourd’hui, je vous propose une brève introduction au pranayama.

Qu’est-ce que le pranayama ?

Pranayama peut se décomposer de deux manières en sanskrit :

  • prana ayama = « libérer l’énergie vitale et lui permettre de se déployer » ;
  • prana yama = « diriger le prana ».

Le pranayama est donc la science de la respiration permettant au yogi de libérer, faire circuler et diriger l’énergie vitale (prana) dans son corps.

Il s’agit du quatrième des huit « membres » (piliers) du yoga, au même titre que les asanas (postures) ou le niyama (ensemble des règles de vie personnelle). On peut même dire que le yoga perdrait son sens sans ce travail sur le souffle, destiné à éveiller l’énergie vitale et à la conserver dans le corps comme dans un récipient.

Un des principes du pranayama réside ainsi dans la suspension de la respiration, sorte d’apnée qui peut intervenir après l’inspiration (rétention poumons pleins — antara kumbhaka) ou après l’expiration (suspension poumons vides — bahya kumbhaka).

C'est ainsi que le yoga nous apprend à respirer (eh oui, bien respirer, ça s’apprend !), c’est-à-dire à produire un souffle toujours plus léger et subtil qui mène, en dernière étape, à un état modifié de conscience.

Il ne s’agit donc pas simplement d’améliorer la respiration, de la fluidifier. Il s’agit surtout d’apaiser le mental, car c’est bien le but ultime du yoga : atteindre un état de plénitude et de détachement complet par rapport au monde.

Quels sont les bienfaits du pranayama ?

Le fait d’adopter une respiration consciente entraîne de nombreux bienfaits pour le corps et l’esprit.

Si le pranayama n’est pas une technique de relaxation, il occupe une place importante dans la gestion des émotions et de la fatigue. D’un point de vue physiologique, une bonne oxygénation des muscles et du cerveau est essentielle au bon fonctionnement du corps, mais aussi du mental. Une bonne respiration aide à garder un esprit clair et serein.

Ces exercices sont ainsi tout à fait recommandés contre le stress, car une bonne gestion du souffle permet de garder un esprit apaisé ou de retrouver le calme en situation de crise.

Les exercices que je vais décrire ensuite, et qui sont les principales techniques de respiration pratiquées dans le pranayama, ont pour conséquence d’augmenter la capacité du sang à transporter l’oxygène, générant un bien-être global. Les vaisseaux sanguins du cerveau améliorent leur capacité de régulation, ce qui a pour effet de réduire les migraines chez ceux qui y sont sujets.

La suspension du souffle renforce aussi la concentration et la volonté du yogi : pratiqué régulièrement, cet exercice apporte des résultats sensibles en quelques semaines.

Charlotte SIgwalt de Yoga Montagne en pratique méditative en pleine nature

Comment pratiquer le pranayama ?

Ces exercices respiratoire demandent une grande concentration et, comme on va le voir, requièrent plus ou moins d’entraînement pour en sentir réellement les effets. Les différents types de souffles que je vous présente ici suivent une gradation dans l’avancement du yogi, pour aboutir à un état méditatif de plénitude profonde, qui demande beaucoup d'expérience.

Ujjayi pranayama : le souffle victorieux

Il est plébiscité dans les cours de yoga, car il est le seul à pouvoir accompagner la pratique des asanas. On l’appelle victorieux, car cette manière inhabituelle de respirer permet de diriger l’attention vers l’intérieur. Il s’agit de resserrer la gorge pour produire un son légèrement bruyant, comme un « haaa » sans vibration des cordes vocales. Entendre son propre souffle induit une écoute attentive et une meilleure conduite de la respiration.

Cette pratique est efficace contre les rhumes légers et les maladies respiratoires, en plus de renforcer la musculature respiratoire.

Pratiloma pranayama

Appelée aussi pratiloma ujjayi pranayama, cette respiration alternée agit sur les polarités gauche/droite, lune/soleil. L’idée étant, grâce à l’alternance, de se recentrer, de s’ancrer dans le milieu, on peut l’utiliser dans la vie quotidienne dès qu’un besoin de stabilité se fait sentir.

Dans cet exercice, on alterne de cette manière :

  • expirez par la narine gauche en fermant la narine droite avec le pouce ; videz complètement les poumons ;
  • inspirez par la narine gauche ;
  • expirez par les deux narines ;
  • inspirez par les deux narines ;
  • expirez par la narine droite en fermant la narine gauche avec l’annulaire ;
  • inspirez par la narine droite ;
  • expirez par les deux narines, etc.

En plus de favoriser la respiration nasale, cet exercice apporte sérénité, équilibre et stabilité.

Kapalabhati

Cette pratique que l’on pourrait traduire par le « crâne qui brille » vise surtout à nettoyer les poumons. Si vous vous demandez pourquoi le crâne est censé briller, c’est l’effet symbolique de la grande clarté d’esprit que le pratiquant expérimente grâce à cette respiration, qui évoque pour certains une grande lumière émanant du crâne.

Ici, l’inspiration est passive tandis que l’expiration est énergique grâce à une contraction des muscles abdominaux et intercostaux. On enchaîne les inspirations et expirations de plus en plus rapidement avant de procéder à une suspension du souffle en engageant mula bandha (périnée), uddiyana bandha (diaphragme) et jalandhara bandha (gorge).

Cette respiration rapide et rythmée est détoxifiante. Elle renforce la musculature respiratoire et aide à acquérir un souffle plus léger.

Bhastrika pranayama

Cette « respiration du soufflet » est considérée comme purifiante, et elle permet de réveiller kundalini, l’énergie de conscience endormie. Elle fait aussi intervenir l’énergie centrale appelée agni (à l’arrière du nombril), force transformatrice du feu. Elle provoque en effet une sensation de chaleur intense, mais aussi une stimulation et une revitalisation importantes.

Cet exercice peut être très fatigant, et il demande beaucoup de pratique.

On commence par une série d’inspirations et expiration énergiques lors desquelles la cage thoracique s’élargit, puis s’abaisse à l’expiration. Après une dernière expiration plus lente et profonde, on inspire avec la narine droite et on retient longuement le souffle en fermant les deux narines. Enfin, on expire lentement par la narine gauche.

On répète cet enchaînement sur plusieurs cycles.

Kevala pranayama

Kevala signifie entier, complet, absolu, pur. C’est le pranayama final, le plus abouti, qui mène naturellement à l’état de méditation. On l’appelle le souffle tari, car il procède d’une absence totale d’action et induit un souffle si léger, si subtil qu’il en est presque absent.

C’est au terme d’un long entraînement impliquant asanas, enchaînements, mudras et pranayama qu’on arrive à cet état de félicité (ananda).

On observe une baisse de la tension artérielle et un ralentissement du rythme cardiaque, un apaisement total de l’esprit et une acuité accrue des sensations.

Vous savez à présent ce que représente le pranayama, et vous savez qu’il est tout à fait complémentaire des asanas : la pratique des postures et des exercices respiratoires n’est en effet, dans le yoga traditionnel, qu’une phase préparatoire à la méditation comme moyen d’atteindre la plénitude. Tout un programme ! Mais rassurez-vous, pas besoin d’arriver au niveau « expert » du pranayama pour profiter de tous les bienfaits du yoga !